PROPOS RECUEILLIS PAR QUENTIN J. AUPRES DE MME PERRIN
-Pouvez-vous vous présenter?
Je m'appelle Hermance PERRIN, je suis née en 1920 et ai donc 92 ans. J'habite depuis toujours le village de Varinfroy près de l'église.
-Quels souvenirs vous reste-t-il de la Seconde Guerre Mondiale?
J'ai quelques souvenirs qui concernent notamment les blockhaus (de la Ligne Chauvineau). Ils ont été construits par des tirailleurs sénégalais et des Zouaves Marocains. Ces soldats étaient très respectueux envers nous. Ils logeaient vers Crouy mais je n'en sais pas plus.
-Quelle anecdote de cette époque vous reste-t-il en mémoire?
Je me rappelle avoir vu 2 avions se battre au-dessus de Varinfroy; un avion canadien et l'autre allemand. Le Canadien s'est écrasé dans un champ vers Beauval, puis l'Allemand envoya 6 bombes qui sont tombées vers l'église, mais à coté sans exploser. J'étais alors chez ma soeur et l'une d'entre elle est tombée sur la route. Les pavés sous le choc ont volé sur le toit de la maison!!
Mon père avait creusé une tranchée dans notre jardin pour nous protéger, on se cachait dedans en cas de danger. Des fois, on entendait des balles siffler partout. Les fameux Tirailleurs Sénégalais nous faisaient rire car à chaque bombe ils se cachaient! Ils nous faisaient plus rire qu'autre chose.
Les Allemands qui étaient à Crouy sont venus attaquer nos blockhaus car ils représentaient une menace pour leurs convois. Un des Sénégalais, s'est fait tuer dans le blockhaus (vraissemblablement celui de la Caisserie). Les autres se cachaient mais se sont fait tuer après dans les bois.Le massacre terminé, ma soeur et moi sommes allées voir les survivants. Un Marocain de la Compagnie des Zouaves était vivant. Il me regardait et j'ai essayé de le soigner. Malheureusement, il était trop blessé et mourut 2 jours plus tard.
Vu le danger, mon père décida de nous faire partir ma soeur et moi car ce n'était pas un endroit pour nous, surtout pour mon fils qui n'avait que 3 ans. Je suis donc partie au début de la guerre et ne suis revenue qu'en 1944. Il manquait une cloche à l'église du village et le village était dévasté. Les Allemands passaient avec de nombreux convois de camions et de chars. Les camions étaient remplis d'hommes tous si jeunes! L'un d'entre eux vint me demander gentiment de l'eau. Je lui en donnai puis il repartit avec son char, le dernier à partir.
Quelques mois plus tard; on vit arriver les Américains. Ils nous expliquaient avec un peu de mal à se faire comprendre que tous les convois allemands avaient été détruits.
Maintenant, j'ai 92 ans et je continue à aller voir la tombe du Zouave au cimetière tous les jours. Je repense à tout ça en me baladant dans Varinfroy.
Varinfroy, janvier 2012
Un grand merci à Mme Perrin pour son précieux témoignage et bravo à Quentin pour avoir mené à bien cette interview.